Founded in 1983 - United for Diversity and Racial Equality

DEUX POLICIERS DU SPVM SUSPENDUS SANS SOLDE PAR LE COMITÉ DE DÉONTOLOGIE POLICIÈRE POUR PROFILAGE RACIAL



Montréal, le 31 août 2020 — Dans une décision annoncée la semaine dernière, le Comité de déontologie policière a suspendu sans solde pour un total de 26 jours, deux policiers de Montréal ayant commis 16 violations du Code de déontologie des policiers du Québec.

L’incident de profilage racial s’était produit en mars 2017 à Montréal-Ouest. Vers 10 heures 30 du soir, monsieur Kenrick McRae attendait dans sa Mercedes que sa compagne termine ses transactions à un guichet bancaire.

Une voiture de police arrivant en sens opposé fit alors un brusque demi-tour et est venue se garer derrière lui. Alors qu’il commençait à rouler, les policiers Christian Benoît and Philippe Bernard-Thomassin lui demandaient de s’arrêter.

À la question de monsieur McRae de savoir s’il avait été interpellé parce qu’il était noir, l’agent Bernard-Thomassin répondit qu’ils voulaient vérifier si le véhicule qu’il conduisait lui appartenait. Après avoir vérifié les papiers de monsieur McRae, le policier changea son histoire et prétendit que ce dernier avait été interpellé parce que l’éclairage de sa plaque ne fonctionnait pas. Monsieur McRae descendit alors de son véhicule pour vérifier cette allégation et filmer l’éclairage de sa plaque qui fonctionnait parfaitement.

Lorsque monsieur McRae informa les deux policiers qu’il allait porter plainte contre eux, l’un d’eux lui demanda de lui remettre sa caméra. Comme monsieur McRae protestait, ils le menottèrent et le forcèrent dans leur auto, en état d'arrestation pour trouble à l’ordre public.

Quelques instants plus tard, d’autres véhicules de police arrivèrent sur les lieux alors que l’un des deux policiers qui avaient arrêté monsieur McRae s’était occupé d’effacer sur la caméra l’enregistrement vidéo de cet incident et d’autres incidents antérieurs. Un superviseur qui était arrivé sur les lieux refusa d’entendre monsieur McRae.

Finalement, les deux officiers relâchèrent monsieur McRae, ne pouvant rien retenir contre lui. Ils lui rendirent sa caméra et l’autorisèrent à partir. En vérifiant sa caméra, monsieur McRae constata que tous ses enregistrements avaient été effacés.

Dans la décision rendue la semaine dernière, le Comité de déontologie policière a conclu que les deux policiers avaient commis de graves violations du Code de déontologie des policiers. En conséquence, il a infligé 34 jours de suspension sans solde au policier Benoît et 28 au policier Bernard-Thomassin, en particulier pour s’être livrés au profilage racial.

Toutefois, considérant que certaines sanctions doivent être purgées de manière concurrente, la suspension effective sera de 13 jours chacun, dont 5 jours pour profilage racial.

« D’un côté, je suis satisfait de la reconnaissance de 16 violations du Code de déontologie, mais, d’un autre côté, je trouve trop indulgente la suspension de 5 jours pour le profilage racial et je ne crois pas que cela envoie un message fort aux trop nombreux policiers qui pratiquent trop souvent le profilage racial », a déclaré monsieur McRae.

« Comme conducteur noir au volant d’une Mercedes, j’ai été trop souvent interpellé et arrêté et je m’attendais à des sanctions beaucoup plus sévères » ajoute-t-il.

Le directeur général du CRARR, Fo Niemi, lui aussi parle de la nécessité de sanctions plus sévères pour combattre le profilage racial.

« Cette suspension de 5 jours est trop indulgente pour avoir un effet dissuasif. Pas plus tard qu’hier, les conducteurs du convoi « Noirs au Volant » ont exprimé avec force, devant le bureau de comté du premier ministre, leur frustration et leur révolte contre le profilage racial et les arrestations pour le seul motif d’avoir la peau noire », dit monsieur Niemi.

« Mise à part la légèreté des sanctions, nous sommes globalement satisfaits que le Comité a pris note sans équivoque de l’étendue de la pratique du profilage racial et dénoncé la mauvaise foi et le manque de professionnalisme des policiers. C’est une des rares fois, dans les 10 dernières années, où le profilage racial est reconnu de manière aussi catégorique », déclare Alain Babineau, conseiller au CRARR.

« Cette décision confirme aussi sans équivoque que les citoyens ont le droit de filmer les interventions policières et que les policiers n’ont pas le droit de saisir les caméras des citoyens, de fouiller et d’effacer l’enregistrement de ces interventions», note Alain Babineau.

La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, de son coté, a aussi saisi le Tribunal des droits de la personne d’une plainte de monsieur McRae contre les deux policiers, le superviseur et la Ville de Montréal.

Une autre plainte de monsieur McRae en déontologie policière, à propos d’un incident de « Noir lavant sa voiture » en août 2019, est encore sous enquête.