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LA POLITIQUE LINGUISTIQUE DISCRIMINATOIRE AU CENTRE DE PRÉVENTION DE L'IMMIGRATION DEVANT LE TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE



Montréal, 15 août 2014 --– Après trois années d’enquête, la Commission canadienne des droits de la personne considère que les plaintes déposées par le CRARR, au nom de cinq agents de sécurité d’origine haïtienne à l’emploi à un centre de détention fédéral pour immigrants à Laval, Qc., nécessitent l'examen du Tribunal canadien des droits de la personne.

La décision de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) constitue une victoire importante pour les cinq agents de sécurité qui ont porté plainte à l’encontre la compagnie Garda. Administré par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), le Centre de prévention de l’immigration (CPI) avait sous-contracté la compagnie Garda pour les services de ses agents de sécurité.

En octobre 2010, Garda émettait une directive sous la forme d’un mémo dans lequel on prohibait l’utilisation d’une langue autre que le français ou l’anglais lorsque les salariés se trouvent en milieu de travail. De plus, le mémo étendait la portée de cette politique interne à tout site administré par l’AFSC. Quiconque allant à l’encontre de cette politique était sujet à des mesures disciplinaires allant de la suspension provisoire au congédiement.

Plusieurs agents de sécurités travaillant au IPC sont de diverses origines ethnoculturelles. En particulier, les agents de sécurité d’origine haïtienne à eux seuls représentaient approximativement 20% des 150 agents au CPI. Pour cette raison, la politique de Garda affectait les employés d’origine haïtienne de manière plus disproportionnée, créant ainsi un environnement de travail toxique pour ces derniers. Après avoir été victimes de diverses mesures disciplinaires pour avoir utilisé le créole sur les heures de travail et ce, incluant les pauses et les heures de déjeuner, quelques employés décidaient de contester la politique interne de Garda avec l’assistance du CRARR.

En 2012, le CRARR dépose des plaintes à la CCDP au nom de ces cinq agents de sécurité. Peu après le dépôt des plaintes, quelques plaignants ont été retirés du contrat et ne travaillent désormais plus au IPC.

Enfin, la portée de cette décision s’étend à tout milieu de travail multiracial et multiculturel où les salariés d’origines ethnoculturelles diverses communiquent souvent dans leur langue maternelle. Cela est valide tant pour des discussions relatives à l’emploi que pour des discussions à caractère plus privé. Selon le rapport d’enquête de la CCDP, « il est dans l’intérêt public qu’un employeur, de réglementation fédérale, s’abstienne d’appliquer une politique de manière discriminatoire et qu’il évite d’utiliser cette politique comme prétexte de discrimination ».

L’audition du Tribunal canadien des droits de la personne permettra également d’examiner le rôle du syndicat des agents de sécurité, ce dernier étant affilié avec l’un des plus grands syndicats du Québec, la FTQ, en ce qui a trait à la position syndicale face à cette politique linguistique et aux effets discriminatoires de celle-ci.