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LE CRARR INTERVIENDRA À LA COUR SUPRÊME DANS UN CAS DE RACISME IMPORTANT POUR LES GROUPES MILITANT POUR L’ÉGALITÉ


Montréal, 5 mai 2014 --- Le CRARR se réjouit de la décision de la Cour suprême, qui a accueilli l’appel de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, et al c. Bombardier inc., et al

Le cas concerne un pilote canadien d’origine pakistanaise, M. Javed Latif, qui avait obtenu en 2004 un poste de pilote pour un appareil Challenger de Bombardier, qui lui a refusé une formation (tenue dans la province de Québec et au Texas aux États-Unis) parce qu’il était considéré comme une menace pour la sécurité par les autorités américaines. Pour avoir accès à une formation sous licence de la Federal Aviation Administration, il devait se soumettre à une vérification de sécurité exigée par le programme Alien Flight Students Program du gouvernement américain, puisqu’une partie de la formation avait lieu aux États-Unis.

Après s’être soumis à la vérification de sécurité, il s’est fait refuser l’emploi et a eu de la difficulté à se trouver un travail comme pilote. Il a déposé une plainte de discrimination fondée sur l’origine ethnique auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui a accueilli sa cause et l’a porté devant le Tribunal des droits de la personne. En 2009, ce dernier a statué en sa faveur et a ordonné à Bombardier de lui payer 385 000 $ d’indemnité et de cesser d’appliquer au Canada les critères de vérification en fonction de la sécurité nationale américaine lors du traitement de demandes de formation de pilote sous licence canadienne.

En automne 2013, la Cour d’appel du Québec a cassé la décision du Tribunal des droits de la personne, laissant M. Latif sans aucune indemnisation. Dès lors, la Commission des droits de la personne a déposé une demande d’autorisation de faire appel de la décision de la Cour d’appel auprès de la Cour suprême afin d’obtenir de celle-ci des clarifications sur plusieurs questions.

L’une de ces questions, ayant des conséquences considérables sur toutes les causes de discrimination au Québec, est de savoir si la Cour d’appel a commis une erreur en exigeant des preuves d’un « lien de causalité » entre l’origine ethnique et la discrimination. La jurisprudence canadienne sur la discrimination exige habituellement la preuve qu’un motif, comme la race ou le sexe, soit un facteur dans une action ou une pratique, ce qui constitue le seuil minimal pour prouver la discrimination.

Toutefois, alors que la Cour d’appel du Québec exige un « lien de causalité », la Cour d’appel de l’Ontario, en juin 2013, a renversé un critère similaire concernant la cause inédite de profilage racial, Peel Law Association c. Pieters. Dans cette cause, concernant l’avocat de droits de la personne Selwyn Pieters et une autre personne noire, toutes deux victimes de profilage racial par un libraire, la Cour de l’Ontario a unanimement soutenu une position plus libérale en rejetant la décision du tribunal inférieur qui exigeait un « lien de causalité entre la distinction arbitraire fondée sur un motif prohibé et le désavantage subi. » Selon les mots de l’honorable juge Juriansz :

« Je crois qu’il est inacceptable, quelle que soit la manière, de coordonner les mots « causalité » et « lien ». Ce faisant, il me semble qu’on rehausse le critère au-delà de ce que la loi prescrit. L’exigence de la Cour divisionnaire d’un « lien de causalité » entre le traitement préjudiciable et un motif prohibé semble aller à l’encontre de l’évolution de la jurisprudence sur les droits de la personne, qui met l’accent sur les effets discriminatoires de conduite plutôt que sur l’intention et la cause directe. » (notre traduction)

Les conséquences pour les droits de la personne sont évidentes si la norme de preuve plus conservatrice et restrictive de la Cour d’appel du Québec prévaut. Il s’agira également de la première fois que la Cour suprême abordera une cause de profilage racial.

Le CRARR se joindra à M. Pieters pour déposer une demande d’intervenant et encourage tous les groupes militant pour l’égalité à intervenir en faveur d’une norme de preuve plus libérale et progressiste.