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LE CAS DE PROFILAGE RACIAL CONTRE LA BMO DEVANT LE TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE


Montréal, 10 février 2014 --- La Commission canadienne des droits de la personne a maintenu la plainte de profilage racial déposée par le CRARR contre la BMO (Banque de Montréal) et a envoyé l’affaire au Tribunal canadien des droits de la personne.

À l’été 2012, le CRARR a déposé une plainte auprès de la Commission au nom d’un client noir et anglophone de la BMO ayant été victime de profilage racial et de la pratique connue sous le nom de « Any Negro will do » (« peu importe quel Nègre »), après s’être rendu à la banque pour retirer de l’argent.

M. Wayne Foster, un professionnel noir dans la trentaine, s’est fait brusquement arrêter par une voiture de police près d’une succursale de la BMO à Laval, où il venait de retirer de l’argent d’un guichet automatique. Plusieurs policiers sont intervenus et la voiture de M. Foster a été interceptée. Un policier a sorti son arme et a ordonné à M. Foster de rester immobile dans sa voiture. Le policier agissait après avoir reçu des renseignements fournis par un employé de la BMO qui avait confondu Mr. Foster avec un des deux voleurs recherchés pour vols de banque dans la région de Laval.

Les éléments différenciant M. Foster et les suspects noirs sur les photos floues que la BMO avait fait circuler auprès des employés sont facilement identifiables : M. Foster est plus costaud, il a l’air plus âgé et son teint est plus clair que celui des suspects. Malgré cela, il a été arrêté, menotté et détenu dans une voiture de police pendant plus de 30 minutes et ce, uniquement parce qu’il avait la même couleur de peau que les suspects.

Bien qu’il ait été libéré, M. Foster fut bouleversé, à juste titre, par l’incident. L’absence d’excuse formelle et sincère de la part de la BMO ou de son employé, ainsi que l’expérience d’avoir craint pour sa vie, l’ont incité à agir. Par conséquent, il a mandaté le CRARR afin de déposer une plainte pour discrimination raciale contre la BMO devant la Commission canadienne des droits de la personne qui l’a reçue et qui a mené une enquêté sur l’affaire.

Comme élément de défense devant la Commission, la BMO a présenté, entre autres, une photo de M. Foster provenant d’un autre guichet automatique de la BMO, prise six mois après l’incident.

L’image, floue, montrait Wayne portant des vêtements de sport amples. Il n’y avait toujours aucune ressemblance entre lui et les suspects (dont l’un était physiquement reconnaissable sur une vidéo).

Le mois dernier, la Commission a conclu qu’elle « n’était pas convaincue que la décision d’appeler la police pour rapporter la présence du plaignant dans la succursale de la [BMO] n’était pas fondée sur le profilage racial » et a décidé d’envoyer l’affaire devant le Tribunal canadien des droits de la personne.

C’est probablement la première fois qu’une banque canadienne est poursuivie devant le Tribunal fédéral pour cause de profilage racial. De plus, l’affaire soulève également des questions de confidentialité étant donné que monsieur Foster n’a jamais consenti à ce que des photos de lui soient prises et utilisées à cette fin. De même, il s’inquiète de la possibilité d’être l’objet de surveillance photographique par la BMO sur une longue période à la suite de sa plainte.

Le calvaire de monsieur Foster reflète une triste réalité vécue par un grand nombre de personnes noires au Canada et aux États-Unis. Trop souvent, celles-ci sont victimes de surveillance disproportionnée et d’erreur sur la personne, et elles subissent des atteintes à leurs droits parce que les policiers ou d’autres autorités se référent à des descriptions vagues et incomplètes de suspects racialisés, qu’ils se communiquent entre eux. Dans la plupart des autres cas, les personnes de race noire sont arrêtées pour la simple raison qu’ils ont la même couleur de peau qu’un suspect.

Le manquement à fournir des descriptions physiques pertinentes/objectives, basées sur la taille, le poids, le teint et les cheveux, et le fait de ne se baser que sur des généralisations simplifiées liées à la race « ils se ressemblent tous » entraînent des répercussions négatives et disproportionnées envers les personnes noire, y compris, mais sans se limiter à : des arrestations injustifiées, des détentions arbitraires, des emprisonnements, des recours à une force excessive, voire des morts d'homme.

Le CRARR a demandé à maintes reprises à la commission des droits de la personne et aux services de police d’adopter, des directives en matière de description du suspect dans laquelle on fait référence à la race, semblables à celles des États-Unis. Cela permettrait d’éviter la diffusion de descriptions vagues de suspects fondées sur la race et d’exposer les personnes noires en particulier à des préjudices potentiels. À ce jour, il n’y a pas de mesures qui ont encore été prises à cet effet.