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CODE DES VALEURS POUR IMMIGRANTS : LA VILLE DE GATINEAU FAIT L'OBJET DE PLAINTES DE DISCRIMINATION


Montréal, 18 janvier 2012 --- Kamal Maghri, un résident de Gatineau depuis 2010, a déposé une plainte de discrimination raciale contre la Ville de Gatineau pour avoir adopté et publié un document destiné aux immigrants concernant les valeurs que ces derniers doivent avoir afin de réussir leur intégration à la vie québécoise.

Monsieur Maghri, citoyen canadien et originaire du Maroc, a mandaté le CRARR pour déposer une plainte en son nom contre la Ville, dans laquelle il allègue être victime de discrimination fondée sur l'origine ethnique ou nationale et sur la race. Selon le CRARR et M. Maghri, le Code des valeurs, adopté et diffusé l'automne dernier par la Ville, constitue un « document comportant discrimination », d'après la Charte des droits et libertés de la personne du Québec car il cible les immigrants et assume que ces derniers ne possèdent pas de valeurs fondamentales.

Selon la plainte, en stipulant que « ce document de référence a été réalisé dans le but de vous permettre de comprendre comment interagir dans la société à laquelle vous venez de vous joindre » et que « de là, l'importance de bien comprendre le système de valeurs dans lequel on va évoluer », la Ville de Gatineau :

  • commet par le biais de stéréotypage fondé sur l'origine nationale ou le statut de citoyenneté, une distinction artificielle entre citoyens natifs du pays et immigrants, en ce qui concerne la connaissance des règles fondamentales de savoir-être et de savoir-vivre telles la manière de traiter les femmes et les enfants; l'hygiène corporelle, la ponctualité, le respect de la propriété privée, et
  • véhicule des informations incorrectes et contraires aux valeurs et aux normes de la Charte canadienne des droits et libertés et à des réalités sociales, économiques et culturelles contemporaines. À titre d'exemples, le Code ne fait aucune référence aux présences historiques des anglophones et des peuples des Premières nations et aux valeurs d'égalité pour les personnes handicapées et LGBT.
  • « Ce document infantilise les immigrants et perpétue des stéréotypes très néfastes sur les immigrants en insinuant qu'ils sont ignorants et primitifs, et ceci contribue aux pratiques discriminatoires dans l'emploi et dans d'autres domaines contre ces personnes. Au fait, cela produit l'effet contraire dans leur intégration car cela les stigmatise et ça renforce les préjugés à leur endroit. C'est révoltant !», dit M. Maghri.

    « C'est purement un message anti-immigrant bien codé et dissimulé dans un langage sophistiqué sur l'identité et les valeurs nationales, qui est inacceptable pour une société qui a besoin et qui veut recruter encore des immigrants hautement scolarisés ainsi que des entrepreneurs».

    « Une institution publique de nos jours ne peut pratiquer cette forme de « mission civilisatrice », avec l'argent des contribuables et des immigrants eux-mêmes », ajoute-il.

    Également, la plainte dénonce la pratique de profilage ethnique et religieux de la part d'une fonctionnaire de la ville, qui a contacté un centre islamique à Gatineau pour se renseigner sur M. Maghri, et qui a effectué une recherche sur internet sur son passé. Elle a ensuite circulé un courriel aux représentants de la Ville et a inclus par erreur M. Maghri sur la liste des destinataires.

    « À cause de mon nom, on présume que je suis Musulman pratiquant et spécifie que je suis arrivé au pays « peu de temps après le 11 septembre », précise M. Maghri. « Cette façon de se renseigner sur un citoyen est non seulement anti-démocratique et contraire aux normes de participation civique que prêche le Code des valeurs, mais elle constitue aussi une violation très grave de ma vie privée ».

    Le CRARR et M. Maghri réclament le retrait du Code des valeurs et l'adoption à sa place d'une déclaration officielle sur les droits de la personne, en vertu des principes des Chartes des droits et libertés; une excuse publique à tous les immigrants de Gatineau et à M. Maghri; un programme d'éducation civique sur les droits de la personne pour tous les résidents de Gatineau, dont le budget est équivalent à ce que la Ville a obtenu de deux ministères du Gouvernement du Québec, et finalement, des dommages moraux et punitifs pour M. Maghri.

    « Nous devons non seulement rappeler aux administrations municipales, notamment les membres de la Coalition canadienne et internationale des municipalités contre le racisme comme la Ville de Gatineau, qu'elles ont des obligations face à la Charte canadienne des droits et libertés ainsi qu'aux conventions internationales en matière de discrimination, » dit le directeur général du CRARR, M. Fo Niemi.

    Il est prévu que d'autres plaintes provenant d'immigrants résidents à Gatineau suivront sous peu.

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    Énoncé de valeurs Gatineau.pdf339.6 KB