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DISCRIMINATION RACIALE DANS LES SOINS DE SANTÉ EN RÉSIDENCE COMMUNAUTAIRE : LA COMMISSION DES DROITS CONTINUE À ENQUÊTER


Montréal, le 9 juin 2011 --- Malgré une recommandation de l'enquêteur de fermer le dossier, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) a décidé de continuer l'enquête sur la plainte de discrimination raciale que plusieurs travailleuses et travailleurs de diverses origines ont déposée depuis 2007.

Depuis plusieurs années, le Centre de réadaptation (CR) Lisette-Dupras a retenu les services de centaines d'employés des agences de personnel, telles le Service d'aide domestique (SAD) et le Service d'aide aux personnes handicapées (SAPH), à  titre d'intervenants en milieu de vie ou de préposés aux résidents pour fournir des services à  ses clients. Ces travailleuses et travailleurs travaillent au CR Lisette-Dupras, mais demeurent techniquement des employés des agences. Cependant, ils reçoivent moins de salaire (10 $ et 12 $ de l'heure pour un travail valant normalement entre 17 $ et 19 $ de l'heure, selon les barèmes du secteur des services sociaux et de la santé); en outre, ils n'ont pas eu droit au régime de retraite et aux autres avantages qu'ont les employés du secteur public pour un travail équivalent.

La majorité des employés de ces agences sont des femmes immigrantes (à  environ 75 %), notamment des femmes d'origine haïtienne, arabe et latino-américaine. À cause de cette majorité des personnes issues des minorités racisées, les Québécoises et Québécois travaillant pour ces agences et au CR Lisette-Dupras subissent les mêmes conditions défavorables. Notons que les centres de réadaptation font partie du réseau des services sociaux et de la santé. Comme les hôpitaux, ces derniers sont financés par le ministère. Ils sont également régis par la Loi sur l'accès à  l'égalité en emploi dans des organismes publics.

En 2008, une cinquantaine d'employées du SAD, toutes origines confondues, ont déposé une plainte de discrimination raciale systémique auprès de la CDPDJ, contre le CR Lisette-Dupras, le SAD et leur syndicat, l'Union des employés et employées de service, section locale 800 (FTQ). Assistées par le CRARR, ces travailleuses et travailleurs seront rejoints par d'autres employés au SAPH, qui déposeront dans les jours qui suivent une deuxième plainte.

Selon M. Alain Croteau, un employé au SAD qui a initié le processus de plainte auprès de la Commission des droits, « Pour la première fois au Québec, nous avons des travailleuses et travailleurs de toutes les origines qui s'unissent pour contester la discrimination raciale et l'exploitation dans l'emploi. Ceci démontre que nous devons être solidaires dans la lutte pour l'égalité ».

Au total, une centaine de personnes réclament des dommages matériels, moraux et punitifs contre leurs employeurs et leur syndicat. Le montant de ces réclamations pourrait atteindre au moins 1 million de dollars.

En mars dernier, les travailleuses et travailleurs ont déposé une requête avec l'aide de la CSN devant la Commission des relations de travail pour faire déclarer le CR Lisette-Dupras comme un employeur de fait, ce qui permettrait des mesures correctrices à leurs conditions de travail. Le CR Lisette-Dupras a congédié 130 des 160 travailleuses et travailleurs durant cette période.

Pour Mme Micheline Alcindor, présidente de l'unité syndicale au SAPH et l'une des victimes dans la deuxième plainte, « Ce dossier est d'une importance capitale pour la situation des femmes au Québec, notamment les femmes immigrantes et racisées, car elles sont de plus en plus les premières personnes touchées et exploitées par la sous-traitance dans le secteur de la santé, surtout avec la privatisation en douceur des soins de la santé, tandis que notre syndicat et le ministère ne font pas grand-chose pour protéger ces femmes ».

« L'organisation des soins de santé en résidence communautaire, avec la croissance des sous-traitances et des relations tripartites entre un centre, une agence et des employés, est devenue complexe, exigeant l'actualisation de nos conceptions traditionnelles pour comprendre cette nouvelle discrimination raciale et sexuelle dans l'emploi », d'ajouter le directeur général du CRARR, Fo Niemi.

« Malgré le traitement problématique de la plainte par la Commission depuis trois ans et demi, nous sommes confiants que ces travailleuses et travailleurs auront gain de cause », conclut-il.