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PROFILAGE RACIAL : LA VILLE DE MONTRÉAL DOIT CESSER LES MESURES DILATOIRES SUITE À UNE DÉFAITE À LA COUR D'APPEL



Montréal, le 21 mars 2011 --- À l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, le CRARR demande au Maire de Montréal de cesser les manœuvres dilatoires afin d'empêcher les tribunaux de se prononcer sur le profilage racial, après avoir perdu une autre bataille devant la Cour d'appel du Québec.

Le jeudi 17 mars dernier, la Cour d'appel du Québec a rapidement rejeté la requête de la Ville de Montréal après avoir entendu les prétentions de cette dernière par le biais de son procureur, Me Pierre-Yves Boisvert. Selon la Ville, une personne qui est trouvée coupable d'une infraction pénale ne peut se plaindre de profilage racial et dénoncer les agissements d'un policier qui mène à  cette infraction pénale et ce, en vertu du principe de la « chose jugée ».

Il s'agit d'un cas de profilage racial qui remonte à  août 2003 et qui a été porté par le CRARR à  la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. En effet, F.F., un jeune d'origine haïtienne vivant dans le quartier St-Michel, s'est fait interpellé avec d'autres amis et amies de la même origine par deux policiers du SPVM, alors qu'ils se trouvaient devant un HLM. Les deux policiers ont uniquement interpellé les jeunes garçons qui étaient assis sur la clôture située sur le terrain du HLM, et ont émis des billets de contravention à  trois jeunes, dont F.F., pour avoir « utilisé le mobilier urbain à  une autre fin que celle à  laquelle il est destiné ».

Non seulement le billet a été considéré illégal, car le terrain appartient à  un propriétaire privé et non à  la Ville de Montréal (donc le règlement municipal ne s'applique pas), mais aussi que l'interpellation et l'émission du billet ont été considérées par la Commission comme étant des actes de profilage racial. En décembre 2007, la Commission recommandait des dommages moraux de 10 000 $ pour F.F.

Entre-temps, F.F. a été trouvé coupable de l'infraction pénale en 2004, ne s'étant pas présenté à  l'audience de la Cour municipale pour contester le billet : il s'agissait donc d'un jugement par défaut.

Le dossier a été porté par la Commission devant le Tribunal des droits de la personne et la Ville de Montréal a présenté une requête en irrecevabilité visant à  faire déclarer que le Tribunal n'était pas compétent pour entendre l'affaire, étant donné qu'il s'agissait d'un appel déguisé de la décision de la Cour municipale, selon la Ville de Montréal. Le Tribunal ayant rejeté la requête de la Ville en août 2008, celle-ci contesta la décision sous la procédure d'une révision judiciaire à  la Cour supérieure (au lieu d'aller directement en appel à  la Cour d'appel). Lorsque la Cour supérieure a rejeté la requête de la Ville en mai 2009, celle-ci porta l'affaire devant la Cour d'appel dont l'audition s'est tenue le 17 mars 2011.

Notons que les trois juges de la Cour d'appel n'ont même pas eu besoin d'entendre les arguments des avocats de la Commission et du CRARR, après avoir entendu celui de l'avocat de la Ville.

Selon Me Aymar Missakila, « la décision de la Cour d'appel va aider de manière substantielle les victimes de profilage racial et la Commission des droits de la personne dans la lutte à  ce fléau, car elle apporte une clarification importante à  la situation actuelle, étant donné que nous avons au CRARR plusieurs cas de ce type ».

D'ajouter le directeur général du CRARR, Fo Niemi, « Nous demandons encore une fois au Maire de Montréal d'arrêter d'utiliser les fonds publics pour faire obstacle aux victimes de profilage racial et au travail de la Commission des droits de la personne ».

« Quoi dire quand la Ville produit des bannières et organise des réceptions vin-fromage pour fêter la Semaine d'actions contre le racisme d'une part, et d'autre part qu'elle dépense des centaines de milliers de dollars pour faire échec à  la protection des droits de la personne, perpétuer le profilage racial et empêcher les tribunaux d'imposer des sanctions contre cette pratique ? », dit-il.

Au cours des trois dernières années, la Ville a utilisé,  au moins une quinzaine de fois, plusieurs recours au niveau procédural pour faire échec à  cinq dossiers de profilage racial se trouvant devant le Tribunal des droits de la personne. En outre, elle a présenté des requêtes pour obliger le président de la Commission des droits de la personne à  témoigner personnellement dans certains cas, et dans d'autres cas, pour empêcher les enquêteurs de la Commission de rencontrer et d'interroger les policiers mis en cause.

Face à  cette situation, le CRARR demandera cette semaine à  la Commission canadienne pour l'UNESCO d'expulser la Ville de Montréal de la Coalition canadienne des municipalités contre le racisme, où les villes membres doivent, comme conditions d'adhésion s'engager à  lutter contre les discriminations et à  promouvoir les droits de la personnes.

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CSQ Montréal c. CDPDJ-CRARR 10-09.pdf31.73 KB
CAQ Montréal c. CDPDJ-CRARR 03-11.pdf82.66 KB